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PHARAMSTER Un regard officinal indépendant sur les médicaments

A PROPOS DE LA SUSPENSION D'AMM POUR LE KETOPROFENE GEL

7 Mai 2010 , Rédigé par Amster Publié dans #MEDICAMENT

A propos de la suspension d’AMM

  pour les spécialités à base de kétoprofène gel

en France

  Spécialités concernées au Maroc

 KETUM gel - KETOFLEX gel - PROFENID gel

  Rédigé en collaboration avec Dr Maria, médecin à Casablanca 

  10-05-07-Ketoprofene-Gel.jpg

L e s   f a i t s  :  

      

         Les prodromes : Selon l'AFSSAPS

 

       - Le kétoprofène est un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) commercialisé en France sous forme de gel depuis1993. Soumis à prescription médicale, le gel est appliqué sur la peau et est utilisé en rhumatologie et en traumatologie bénigne, pour ses propriétés antalgiques. 22 spécialités contenant du gel de kétoprofène étaient autorisées en France.

       - Des cas de photoallergie (réactions cutanées exagérées et/ou anormales à la lumière), souvent graves, ont été rapportés chez des patients traités par des gels contenant du kétoprofène.

       - Ces réactions se présentent le plus souvent sous forme d’eczéma et de bulles pouvant s’étendre au-delà de la zone d’application. Leur gravité peut conduire à des hospitalisations et à des arrêts de travail.

       - Cet effet indésirable a conduit l’Afssaps à modifier l’information de ces médicaments à deux reprises en 1996 et en 2001, à l’issue de deux enquêtes nationales de pharmacovigilance. De plus, un pictogramme incitant les patients à ne pas s’exposer au soleil même voilé avait été ajouté sur les conditionnements en 2001. Malgré ces mesures d’information, les données de sécurité d’emploi montraient que ces réactions étaient toujours rapportées. 

       - En 2003, l’Afssaps a adressé une lettre aux professionnels de santé afin de leur rappeler les précautions d’emploi inhérentes à l’administration des gels contenant du kétoprofène. 

       - La persistance de la survenue et de la déclaration de cas de photoallergie, malgré la prise de ces nombreuses mesures, a conduit l’Afssaps à déclencher la réévaluation du rapport bénéfice/risque des gels de kétoprofène. 

       -. Dans ces conditions, l’Afssaps a décidé de suspendre l’AMM de toutes les spécialités sous forme de gel contenant du kétoprofène dans l’attente des résultats de la procédure de réévaluation européenne. Cette mesure a pris effet le 12 janvier 2010 et s’est accompagné d’un retrait des lots disponibles sur le marché.

 

         1er  Round décembre 2009

       - Le 18 décembre 2009. En raison, selon l'AFSSAPS, de l’efficacité faible à modérée de ces médicaments et de l’existence d’alternatives thérapeutiques, l’Afssaps a considéré que le risque lié à l’utilisation des gels de kétoprofène, (photoallergie au kétopprofène proprement dit mais aussi allergie découlant de l’interaction entre le kétoprofène et l’octocrylène, substance utilisée comme filtre solaire), était supérieur au bénéfice attendu et qu’aucune mesure supplémentaire à celles prises précédemment ne pouvait garantir davantage la sécurité des patients

Sur la base de ces arguments, l’Afssaps suspend les autorisations de mise sur le marché (AMM) de tous les médicaments contenant du kétoprofène sous forme de gel destinés à être appliqués sur la peau. Cette mesure impliquait qu’il ne sera plus possible de se procurer de gel de kétoprofène en France à compter du 12 janvier 2010.

      - Cette décision faisait suite aux avis défavorables de la commission d’autorisation de mise sur le marché (AMM) du 24 septembre 2009 et du 3 décembre 2009 quant au maintien sur le marché des spécialités à base de kétoprofène gel.

En effet, à partir des données de sécurité disponibles au moment de cette réévaluation :   

371 cas d’effets indésirables dont 62% étaient graves (en raison d’une hospitalisation ou d’un arrêt de travail), ont été rapportés de janvier 2001 à février 2009 chez des patients traités par kétoprofène gel.

Dans la très grande majorité des cas, il s’agissait d’un effet indésirable cutané. Parmi les effets indésirables graves, 44% étaient des réactions de photoallergie. L’exposition solaire est un facteur déterminant et la plupart des cas est observée entre les mois de juin et septembre. Aucun décès n’a été signalé.

Par ailleurs, un nouvel élément, est apparu lors de l’évaluation. En effet, les données disponibles [Cf Réf Bibilio.] montrent l’existence d’une allergie associée à l’octocrylène [L’octocrylène est un filtre solaire largement utilisé dans les produits d’hygiène courante et cosmétique] : l’application consécutive d’un produit contenant de l’octocrylène, chez des patients ayant développé une réaction de photoallergie au kétoprofène par le passé, a conduit dans plusieurs cas à l’apparition d’un nouvel épisode de photoallergie (en l’absence d’application concomitante d’un gel de kétoprofène).  

Références bibliographiques :

1 - FOTI C., BONAMONTE D., CONSERVA A. et al. Allergic and photoallergic contact dermatitis from ketoprofen : evaluation of crossreactivities by a combination of photopatch testing and computerized conformational analysis. Curr Pharm Des. 2008.

2 - BONNEVALLE A, THOMAS P. Réactions croisées entre le kétoprofène et l’octocrylène Nouv Dermatol 2008 ; 27 suppl 5 : 64

3 - VEERLE DEVLEESCHOUWER, RIK ROELANDTS, MARJAN GARMYN AND AN GOOSSEN. . Allergic and photoallergic contact dermatitis from ketoprofen: results of (photo) patch testing and follow-up of 42 patients. Contact Dermatitis 2008: 58: 159–166.

4 - DELPLACE D, BLONDEEL A. Octocrylene: really non allergenic ? Contact Dermatitis. 2006 ; 54 : 295.

5 - CARROTTE-LEFEBVRE I, BONNEVALLE A, SEGARD M, DELAPORTE E, THOMAS. Contact allergy to octocrylene Contact dermatitis 2003: 48; 46-7

Liens AFSSAPS :  

1 - AFSSAPS : QUESTION / REPONSES 18 DECEMBRE 2009

2 -  AFSSAPS POINT D’INFORMATION JANVIER 2010

 

       2ème Round janvier 2009

        - Le laboratoire qui commercialise la spécialité Ketum® (MENARINI) a déposé une requête en référé-suspension auprès du Conseil d’Etat à la fin du mois de décembre 2009, pour contester la décision française.

      - Dans l’attente d’une décision définitive (jugement au fond) du Conseil d’Etat, le juge des référés a suspendu le 26 janvier 2010 la décision du Directeur général de l’Afssaps concernant l’autorisation de mise sur le marché du gel Ketum® contenant du kétoprofène.

      - Cette ordonnance, prise dans le cadre d’une procédure d’urgence, intervient dans l’attente d’une décision du Conseil d’Etat sur le fond du dossier. Elle a pour conséquence à ce stade, la possibilité pour le laboratoire Menarini de remettre sur le marché le gel Ketum®. Néanmoins, cette ordonnance ne préjuge pas de l’issue dans le courant du 1e semestre 2010 de la réévaluation communautaire en cours.

 

L ’ a v i s   d u   p h a r m a c i e n   &   d u   m é d e c i n :

      - Ces débats concernent les français aussi bien que les marocains car nous disposons au Maroc (sauf omission de notre part) de 3 spécialités en gel à base kétoprofène.   

      - Face à ces discussions en France, on observe au Maroc un manque de communication pesant sciemment du côté des laboratoires et un manque d’information et de réactivité du côté de l’administration.

Et comme d’habitude on observe la même absence d’implication intellectuelle des organisations professionnelles qui restent généralement embourbées dans des considérations corporatistes certainement légitimes, se délaissant malheureusement par la même occasion de la défense de nos patients qui doivent être au cœur de notre métier.           

Notre propre expérience :

     - En plus de 10 ans d’exercice (officine et médecine) nous n’avons enregistré aucune plainte où le kétoprofène gel aurait été incriminé ; cela dit à notre avis, les laboratoires implantés au Maroc, auraient dû  au moins envoyer un mailing aux médecins et  pharmaciens leur rappelant le risque de survenue de réactions de  photosensibilité (le prospectus et le pictogramme à eux seuls ne suffisent pas ) et les incitant par un sondage par exemple, à relever ce genre de réactions suite à l’administration de ces produits. Une telle transparence leurs fera honneur et leur confèrera encore plus de crédibilité.    

     - Dans l’attente de la réévaluation du rapport bénéfice/risque par une commission de l’afssaps, soyons vigilants auprès de nos patients sous kétoprofène gel : notre conduite à tenir sera de leur recommander  de se protéger contre le soleil pendant le traitement et jusqu'à 2 semaines après son arrêt et de signaler aux médecins et pharmaciens tout effet nocif suite à l’application du produit.

 

Cette affaire est donc à suivre puisqu’il y aura certainement un 3ème round de discussions et de décisions, que nous nous empresserons à communiquer dès qu’il y aura du nouveau.  

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