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PHARAMSTER Un regard officinal indépendant sur les médicaments

TABLE RONDE DE TRANSPARENCY MAROC SUR LE PRIX DU MEDICAMENT

14 Mai 2010 , Rédigé par Amster Publié dans #MEDICAMENT

Débat sur le prix des médicaments au Maroc,

Transparency Maroc s’y invite

 

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Sources :

1 - Ana Lopes « Gouvernance et transparence dans le secteur du médicament. Appel à une régularisation urgente » AUFAIT, n°745, page 4, du 13/05/10

2 - S.T. BENNANI «  Nouveau pas vers la transparence » LES ECHOS QUOTIDIEN  N°127, page 21,  du 13/05/2010

3 - K. SKALLI « Prix du médicament Parlementaires et industriels sur le ring » LE SOIR, N°570, page 8 du 13/05/10

 

         Nous avons déjà consacré à ce sujet plusieurs articles sur ce blog, et on pensait qu’il n’y avait pas grand-chose à ajouter, et que le temps était plutôt aux tractations en coulisses et au travail des groupes de pression.

1 - PRIX DES MEDICAMENTS : LE SCANDALE 
2 - PRIX DES MEDICAMENTS : ENQUÊTE PARLEMENTAIRE 
3 - PRIX DU MEDICAMENT : NOUVELLES CONFIRMATIONS 
4 - LE PRIX DU MEDICAMENT AU MAROC : L'ARGUMENTAIRE DES INDUSTRIELS 
 

5 - PRIX DES MEDICAMENTS : LES GRANDES MANOEUVRES

Neuf mois après la publication du rapport parlementaire, Transparency Maroc vient de raviver le débat public en organisant une table ronde pour débattre de la gouvernance et de la transparence dans le secteur médicament, tenue mardi 11/05/2010 à Casablanca,

 

Cette table ronde a eu l’intérêt de rassembler les divers protagonistes de ce dossier et qui selon le journal le soir « s’est transformée, sans grande surprise, en un véritable ring, chaque partie a brandi ses armes pour défendre ses intérêts ». AUFAIT parle lui « d’une table ronde aux allures de règlement de comptes »

Ont pris part à cette rencontre, qui avait pour objectifs de proposer “une politique cible pour édifier un système de régulation efficace, transparent et juste” :

- M. Khalid El Hariry , rapporteur de la mission parlementaire sur le prix du médicament,

- M. Rahal Mekkaoui Secrétaire Général du Ministère de la Santé,

- M.Abdelaziz Adnane, Directeur général de la Caisse Nationale des Organismes de prévoyance Sociales CNOPS,

- M. Ali Sedreati, Président de l’Association Marocaine des Industries Pharmaceutiques-AMIP

- M. Rachid Filali Meknassi , Secrétaire Général de Transparency Maroc

 

Nous vous rapportons ici les déclarations des un et des autres tel qu'elles ont été rapportés par quelques journaux de la place.

      M. Ali Sedreati AMIP :  

- « La technologie développée par les opérateurs industriels du médicament et la qualité infaillible de leurs produits ont fait du Maroc l’un des pays les plus avancés dans le domaine. Le Maroc n’a rien à envier aux pays d’Europe dans la fabrication du médicament» 

- « Il faut comparer le comparable. La comparaison avec la Tunisie et la France n’a pas de sens, elle n’a pas lieu d’être» [3]

- Au Maroc, il existe près de 10.000 pharmacies pour à peu près 30 millions d'habitants et selon les industriels, le chiffre d'affaires des pharmacies marocaines est 35 fois moins important qu'ailleurs. [1]

 

      M. Khalid El Hariry , rapporteur de la mission parlementaire sur le prix du médicament

- « La problématique de la gouvernance dans le secteur du médicament était un sujet tabou et méconnu et grâce à notre rapport, il ne l'est plus heureusement. A ce jour, l'ensemble des conclusions restent valables et la mise en œuvre des recommandations est encore plus urgente aujourd'hui. » [1]

     Abdel Majid Belaiche, Le consultant de l’AMIP, qui a réalisé l’étude des industriels, s’emporte et lance sur un ton cru au parlementaire  Khalid Hariri :

«Les chiffres contenus dans votre rapport sont faux. Vous auriez dû confier l’enquête à un cabinet d’étude spécialisée dans le domaine. De cette façon, vous auriez évité les reproches»

     M. Khalid El Hariry

 Le rapporteur de la mission parlementaire, gardant son calme et sa courtoisie habituels, réitère son appel à l’urgence de la révision des procédures de fixation du prix du médicament    

     M. Rahal Mekkaoui , Secrétaire général du ministère de la Santé

A ce même sujet le Secrétaire général du ministère de la Santé rétorque qu’une nouvelle formule basée sur un benchmarking international fait actuellement l’objet de discussions entre le ministère et les industriels. L’homme fort du département de Baddou rappelle également qu’une agence du médicament est en cours de création

     M. Khalid El Hariry & M. Abdelaziz Adnane, directeur général de la CNOPS (Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale)

Lors des discussions, la question de l’emprise des industriels pharmaceutiques sur les médecins a été soulevée avec acuité par M. Khalid Hariri et M. Abdelaziz Adnane. Les opérateurs industriels n’ont pas réagi sur ce point épineux.

     Abdelaziz Adnane,

- «La part des génériques est très faible par rapport aux princeps dans nos dépenses. Pour mettre fin à la complicité des médecins avec les industriels, il faut institutionnaliser la prescription de l’ordonnance par DCI (Dénomination commune internationale) et mettre en place un cadre légal pour asseoir des règles juridiques qui assurent la transparence dans les relations prescripteurs/industriels», insiste le patron de la CNOPS,

- «La pérennité du régime est menacée si le prix du médicament reste élevé et le générique très peu utilisé»

- Il propose aussi : «l’interdiction d’importer des médicaments princeps quand son générique existe au Maroc» et de «s’orienter vers des licences obligatoires pour casser le monopole des spécialités pour lesquelles il n’ya pas d’alternatives thérapeutiques»

     M. Abdelaziz Adnane, et la marge des pharmaciens :

Le patron de la CNOPS a proposé d’adopter une marge dégressive en fonction du prix du médicament, à l’instar de la France. Une proposition qui a suscité la colère des pharmaciens présents dans la salle.

     Un membre du Syndicat des pharmaciens de Casablanca présent dans la salle :

«Cette mesure adoptée par la France fait l’objet actuellement de débat. Elle est contestée par les pharmaciens français qui revendiquent son annulation et de revenir à l’ancien mode de calcul de la marge», lance sur un ton coléreux, un membre du Syndicat des pharmaciens de Casablanca.

      M. Walid Amri Le président Syndicat des pharmaciens de Casablanca

Lui ajoute que «les pharmaciens sont prêts à réduire leur marge de 5% pour les médicaments très coûteux notamment ceux utilisés contre le cancer et qui échappent actuellement à leur circuit».

      Rachid Filali Meknassi Secrétaire général de Transparency Maroc & universitaire

«La marge était auparavant justifiable quand les pharmaciens avaient des laboratoires et fabriquaient des produits. Cependant, actuellement ils ne sont que des commerçants qui vendent des médicaments fabriquées par l’industrie», note-t-il

       Les pharmaciens présents dans la salle :

Réduire les pharmaciens à de simples commerçants n’a pas plu aux professionnels. Mais ce qui a provoqué un tollé dans la salle est le fait que M. Meknassi compare leurs officines à des boutiques. Rachid Filali Meknassi a par ailleurs souligné que le marché du médicament est déterminé par l’offre et non la demande. «Ce sont donc les industriels qui décident du médicament à mettre sur le marché et non l’administration ni le patient»

 

L’avis de l’apothicaire du coin :

        Que peut-on retenir de ces joutes verbales ? Si la réaction des industriels était conforme aux prévisions (comme on dit dans la bourse), si la réaction du directeur de la CNOPS était elle aussi prévisible vu ses positions précédentes au sujet de la marge des pharmaciens. On note la réaction plutôt sereine des parlementaires qui malgré les attaques virulentes n’ont pas modifié leurs conclusions, il faut dire qu’ils sont appuyés en cela par l’appréciation très positive du rapport parlementaire par les analystes économiques, qualifié d’«excellent » par un journal comme L’ECONOMISTE.

        La véritable nouveauté de ce débat réside en fait dans la position publique exprimée par Rachid Filali Meknassi Secrétaire général de Transparency Maroc.

En réalité ce que dit le Secrétaire général de Transparency Maroc n’est pas tout à fait nouveau, cette position a été explicitée de façon plus académique et plus nuancée par Jacques Attali  dans un rapport sur « les freins à la croissance »  remis à Nicolas Sarkozy le 23 janvier 2008.

C’est en fait la position d’une bonne partie de notre intelligentsia qui a du mal à comprendre l’utilité de l’officinal.

Face à ces attaques les pharmaciens souvent se barricadent derrière des textes de lois et au mieux ils osent des concepts : une fois c’est « l’opinion pharmaceutique » et une autre fois c’est l’ETP « l’éducation thérapeutique du patient » pour justifier leurs émoluments.

Nous pensons, de bonne foi et sauf erreur, qu’il est nécessaire d’opérer un changement de repère radical pour l’officinal en mettant le patient au cœur de son métier au lieu du médicament ou pire encore la caisse.

Cela veut dire, prendre des positions courageuses et irréfutables en faveur de ce patient qui est notre véritable donneur d’ordre. L’industrie reste un partenaire stratégique face à qui on doit marquer notre indépendance intellectuelle et scientifique en osons donner notre avis en toute liberté sur le fond des thérapeutiques et en étant une force de proposition critique et constructive dans l’intérêt de nos patients.

Dans cette optique, l’officine devient alors une véritable plateforme de proximité à même de collecter les doléances de nos patients, (voire les exigences de nos médecins), toute en étant un acteur effectif de la santé.

Mais ne soyons pas dupe, cela nécessitera un effort colossal, au début et permanent par la suite, en terme de mise à niveau des connaissances de l’officinal (chimie, pharmacologie, biologie). Combien sont-ils les officinaux prêts à faire cet effort ? Nos intenses sont-elles prêtes à se libérer intellectuellement de la domination scientifique des industriels ?                                

En fait c’est le genre de discoure tenu par Rachid Filali Meknassi et autres, qui nous a poussé à rédiger « Le rôle du pharmacien » et à développer par le suite PHARHAMSTER qui est une modeste contribution sans grande prétention, qui vise à monter simplement le quotidien d’une officine de quartier en toute humilité.

PHARHAMSTER est en soi un cri de passion pour notre métier et un cri de tristesse pour notre profession.     

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